Allaiter en 2017

Je vous préviens, ça va être long !

A l'aube des 6 mois de Rose, et donc d'aillaitement exclusif, j'aimerais prendre le temps de revenir sur mon expérience ersonnelle de l'allaitement ; avant bébé et avec bébé.

Avant de tomber enceinte, je ne m'étais jamais posé la question, pour moi allaiter était naturel et la meilleure chose à faire. Malgré tout à mes yeux les bébés buvaient au biberon, j'ai toujours vu les bébés de mon entourage au biberon, l'objet "biberon" était très ancré dans mon inconscient. Je suis tombée enceinte, j'ai donc voulu toute une panoplie de biberons "pour le bébé", appuyée par ma mère qui me disait "il t'en faut". Il m'en fallait. Au fur et à mesure de la grossesse, j'ai commencé à réfléchir (🖒👏) et à me questionner ; pourquoi me faudrait-il des biberons puisque je vais allaiter ?! Quand j'ai posé question à mes parents, j'ai eu la fameuse réponse "ne dis pas que tu VAS allaiter, tu vas ESSAYER, ça se trouve tu ne pourras pas".
 

Bah merde alors, comment l'espèce humaine a-t-elle survécu millénaires après millénaires ?! Y'a encore quelques générations, un bébé non allaité était un bébé qui allait mourir. Pas besoin de réfléchir bien longtemps pour se dire qu'un truc clochait. J'ai poussé les recherches. J'ai commencé à me rendre compte que la plupart des trucs sur l'allaitement dits dans les magazines de futurs parents étaient du gros caca 💩 pour rester polie. J'ai découvert un super groupe Facebook (Allaitement ATCE) avec des animatrices formées et des IBCLC. J'ai découvert ce qu'était une IBCLC : International Board Certified Lactation Consultant. La seule praticienne à qui j'allais pouvoir accorder ma confiance à 100% à propos de l'allaitement.
 

J'ai découvert La Leche League, groupe de soutien et d'information sur l'allaitement tenu par des animatrices bénévoles, mères de famille allaitantes et formées en allaitement. Plus j'apprenais sur l'allaitement, plus il y avait à apprendre, plus j'avais hâte d'allaiter pour mettre en pratique toute cette théorie ! Je partageais toutes mes découvertes avec mon chéri, qui s'étonnait avec moi de voir tous les "mythes" entendus à droite et à gauche sur l'allaitement débinés un à un. Au moment de me rendre à mon cours de préparation à l'allaitement, je me suis dit "la sage n'a pas intérêt à dire de bêtises, je suis calée maintenant, je ne la laisserais pas faire" et la sage femme en question se présente...
 

Dominique, Consultante en Lactation IBCLC. J'aurais eu le père Noël devant les yeux c'était pareil ! J'ai bu chacune de ses paroles, elle a confirmé tout ce que j'avais pu apprendre par moi-même les mois précédents et m'a appris quelques nouvelles choses, et surtout je suis repartie de ce cours avec sa carte, son numéro de téléphone et ses paroles que je n'oublierai pas: "pour allaiter, il faut au moins un sein et être bien informée sur l'allaitement et la lactation humaine". C'est pas inné, l'allaitement, seulement avant on grandissait entouré de bébés et d'enfants allaités, le savoir de l'allaitement se passait de grand mère en mère en fille en tante en cousine en voisine en amie etc etc...
 

De nos jours avec l'omniprésence du lait artificiel la chaîne est brisée. Il faut aller récupérer les infos un peu partout et nulle part, trier les bonnes et les mauvaises au petit bonheur la chance et croiser les doigts pour "pouvoir" allaiter. OU (et c'est ce que je conseille à toutes les futures mères) aller voir une IBCLC pour qu'elle nous fasse un petit récapitulatif de l'allaitement en long en large et en travers. Après ce cours, quand ma mère m'a apporté de l'eau minérale "pour les biberons, au cas où tu ne pourrais pas allaiter", j'ai dit "j'allaiterai" et on a bu les bouteilles avec le futur papa (#REBELLES). Nous étions préparés en théorie à tout ce qui pouvait arriver, le meilleur comme le pire.
 

Ça fait un peu préparation de guerre mais je suis intimement persuadée que c'est ce qui a rendu notre allaitement si facile et si limpide par la suite ; nous étions préparés, et nous avions confiance ; en nous, en notre instinct de mammifère, en notre bébé.

Et puis un jour, après un accouchement qui a frôlé la catastrophe, nous avons rencontré notre fille. Il était temps de mettre la théorie en pratique..
 

Pour être honnête, je me souviens des 15min après l'accouchement, et ensuite j'ai un énorme trou noir de 8h. Je sais qu'on a tout de suite mis Rose au sein mais qu'elle ne tétait pas. L'aventure n'a pas commencé comme je l'imaginais. Elle était groggy et j'étais dans les vapes, et apparament je harcelais chaque personne qui entrait dans la pièce façon nana bourrée en leur demandant "MAIS POURQUOI ELLE TÊTE PAS C'EST PAS NORMAL IL FAUT QU'ELLE TÊTE JE VEUX L'ALLAITER AIDEZ MOI". A chaque fois la personne essayait de la stimuler mais il n'y avait rien à faire. En fait elle a fait sa première tétée 8h plus tard, au moment où j'ai commencé à émerger, je me souviens que j'en ai pleuré de bonheur de la nourrir enfin.

Ensuite c'est bien simple elle est restée scotchée à mon sein pendant à peu près tout le séjour à la maternité. Si je n'y avais pas été préparée (après un accouchement un peu chaotique mère et enfant peuvent avoir besoin de se rassurer mutuellement) j'aurais certainement flippé du rythme intensif (sur mon carnet de suivi de maternité, une tétée toutes les 30min/1h jour et nuit !..) Mais non. Je savais que c'était normal et passager, je la mettais au sein au moindre signe d'éveil, elle tétait correctement, pas de freins ni de lèvre ni de langue à l'horizon, tétines prohibées pour mettre toutes les chances de notre côté, pas de crevasses, un début d'allaitement ultra intensif mais finalement plutôt chouette. Le rythme est resté très éprouvant jusqu'à ses 3 semaines où ça a commencé à se calmer, elle a encore espacé les tétées vers 6 semaines, et à partir de 3 mois elle ne réclamait plus que toutes les 3 ou 4h.

Pour dormir la nuit nous sommes très vite passées d'abord en surdodo puis en cododo ; ça l'arrange parce qu'elle tête quand elle veut, ça m'arrange parce que je peux dormir toute la nuit (et quand il y a micro réveil pour la positionner correctement par exemple, l'endorphine déclenchée par la tétée me permet de me rendormir quasi instantanément) (#lanatureestbienfaite), et ça arrange le papa qui n'a pas à se réveiller de la nuit. J'ai eu deux fois très très mal à cause de canaux lactifères bouchés mais y étant préparée et sachant comment réagir, ça n'a jamais duré plus de 48h. On ne le répètera jamais assez mais allaiter n'est pas censé faire mal, et si vous avez mal c'est qu'il y a un souci à régler !

En fait tout ça pour dire que le vrai problème je l'ai rencontré partout ailleurs ; la famille et ses mauvais conseils (surtout quand tu ne demandes rien) "elle tête trop" "elle va devenir obèse" "elle aura mal au ventre si tu n'espaces pas les tétées de 3h" (coucou le formatage au lait artificiel) "c'est dangereux on ne sait pas ce qu'elle boit" "oula tu bois un verre d'alcool ?!?" "Tu ne devrais pas manger ça" "selles rares?! Non elle est constipée plutôt!" "T'es sûre que ton lait est toujours nourrissant ?" "T'as peut être plus assez de lait c'est pour ça qu'elle tête autant" j'en passe et des meilleures... Mais surtout et c'est là où ça m'inquiète le plus pour les futures mamans allaitantes peu informées (Après tout toutes les familles ne sont peut être pas aussi peu branchées allaitement que les nôtres) ; les mauvais conseils venaient aussi de médecins, sages femmes ou auxiliaires puer : "il faut désinfecter vos seins à l'alcool avant et après la tétée" "C'est le lait qui donne des crevasses" "l'allaitement à la demande c'est seulement les 1ères semaines" "Elle doit téter minimum 30min et sur les deux seins" "si elle tête plus de 10min vous devez l'enlever du sein" (?!?) "c'est pas normal de pas savoir combien de fois elle tête par jour vous allez mal la nourrir à force" "n'hésitez pas à lui donner de l'eau" etc etc jusqu'à ce qu'on tombe sur THE pédiatre en or, formée à l'allaitement et pour qui les mécanismes de la lactation humaine n'ont pratiquement aucun secret ; le soulagement ! On l'a trouvée vraiment vite en plus (pour les 2 mois de Rose) donc je n'ose même pas imaginer ce qu'on aurait pu entendre d'autre dans la bouche d'autres médecins, formés à l'allaitement autant que moi en chirurgie plastique.

Bref, allaiter en 2017, il faut le vouloir et se balader avec des boules Quies ! Mon fiancé et moi avons limite passés plus de temps à répondre aux questions, aux affirmations erronées et aux mauvais conseils qu'à allaiter Rose 😂

Tout ce roman aussi pour expliquer pourquoi je parle autant de notre allaitement ; j'aurais aimé étant fillette puis jeune fille puis femme voir plus de femmes allaiter. J'aurais aimé qu'on me familiarise mieux et plus vite avec l'allaitement. J'aurais aimé ne pas avoir ce réflexe de "j'ai un bébé donc il me faut des biberons pour le nourrir". J'aurais aimé savoir plus tôt les différences (de taille !) entre le lait en poudre et le lait humain. J'aurais aimé que ma mère me dise "d'accord, tu allaiteras, c'est génial Rose aura un lait-médicament sur mesure et à volonté" au lieu de me ramener de quoi faire des biberons en me disant de ne pas mettre trop d'espoir sur l'allaitement. J'aurais aimé que ça continue de couler de source (😁) pour tout le monde, soignants y compris. J'aurais aimé que toutes les femmes autour de moi qui ont du stopper leur allaitement car elles "n'avaient plus assez de lait" ou que leur lait "n'était plus nourrissant" soient accompagnées par des personnes formées au lieu de tomber sur des gens qui leur sortent des bêtises plus grosses qu'eux. J'aurais aimé que toutes celles qui ont arrêter leur allaitement en larmes à force de souffrir tétée après tétées bénéficient d'une prise en charge d'urgence par du personnel formé pour qu'elles n'aient pas à vivre aujourd'hui avec un sentiment d'échec tenace et une culpabilité qui n'a pas lieu d'être. Voilà pourquoi j'ai décidé d'en parler, de le photographier, de ne pas me cacher. J'aimerais que tout ça redevienne normal. Pro choix OUI définitivement ! Je n'imposerais jamais rien à personne. Mais perdre la culture de l'allaitement c'est à mon sens condamner tous les allaitements à venir.

❤